Hydroélectricité

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28 octobre 2025

«FMV constitue un partenaire de confiance pour soutenir les communes dans les différentes étapes du processus stratégique des retours des concessions»

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Propos recueillis par Pascal Fauchère

INTERVIEW - Les retours des concessions représentent un enjeu majeur de politique énergétique pour la communauté valaisanne. Par son expertise reconnue et sa voix légitime, David Melly, président de l’Association des communes concédantes, contribue à une meilleure compréhension des dynamiques à l’œuvre dans ces dossiers stratégiques.

Les retours des concessions constituent un enjeu stratégique de la politique énergétique valaisanne. Et sont plus que jamais d’actualité. Au cours de ces trente-cinq prochaines années, pas moins de 17 concessions vont arriver successivement à échéance en Valais. Canton et communes pourront donc à nouveau jouir des eaux et acquérir les aménagements construits, selon les modalités définies par la loi.
Le point de vue de David Melly, président de l’Association des communes concédantes (ACC) qui regroupe 82 collectivités valaisannes, propriétaires des eaux concédées par bail à des sociétés hydroélectriques, à des fins de production d’énergie.
Qu’est-ce qu’implique un retour de concession pour une commune concédante aujourd’hui ?
L’impact de ce type de dossiers est important pour une commune concédante en termes d’anticipation et d’organisation. Dix ans avant le délai officiel, les collectivités peuvent demander un état des lieux des installations hydroélectriques à la société d’exploitation. Si le concessionnaire dépose sa demande de renouvellement au moins quinze ans avant la fin de la concession, alors la collectivité doit annoncer son intention d’exercer le droit de retour au plus tard dix ans avant l’échéance.
C’est particulièrement important lorsqu’il y a des projets d’agrandissement ou de rénovation. Si aucune demande n’a été faite dans ces délais, on peut s’attendre à une déclaration du droit de retour environ cinq ans avant la fin de la concession. Ce temps long et des concessions d’installation touchant souvent plusieurs communes nous oblige à mettre sur pied un système qui s’étend au-delà des législatures politiques. La constitution d’une association de communes ou d’une société simple permet de garder la main sur les connaissances acquises et le suivi, pour une efficacité pérenne et partagée. C’est ce qu’ont fait par exemple les collectivités impliquées dans les dossiers Dixence, Gougra ou Mattmark. Dans le même esprit, l’implication de « FMV – Forces Motrices Valaisannes » dans le processus des retours des concessions permet aux communes concédantes de bénéficier de l’expertise de ce centre de compétences tout en conservant une indépendance de vue.
Comment l’ACC perçoit-elle le rôle de FMV dans les retours des concessions ?
Tout d’abord, soulignons que les relations entre l’ACC et FMV sont très bonnes. Ce qui constitue un réel avantage. Ensuite, ce centre de compétences, mandaté par le canton, travaille en bonne intelligence avec tous les partenaires et est tant au service des communes que du Valais en général. FMV est ainsi un partenaire futur des aménagements en qui les communes concédantes ont confiance.
Comment appréciez-vous le travail qui s’organise au sein des communes concédantes concernées par un dossier de retour des concessions ?
La palette d’actions est assez variée. Globalement et sans surprise, on peut dire que plus la part d’une commune impliquée dans un retour de concession est importante, plus son engagement est fort. Elle arrive néanmoins à « embarquer » une commune moins concernée dans l’analyse du dossier en partageant au mieux les informations et le suivi.
La volonté de travailler selon la stratégie valaisanne est-elle perceptible dans les exécutifs communaux ?
Oui. Les autorités communales concernées par un retour de concession connaissent la problématique, les éléments de la loi et la stratégie Forces Hydrauliques valaisanne. Elles travaillent dans cette vision à long terme qui veut conserver la maîtrise de 60% de la force hydraulique en mains valaisannes, avec 30% au Canton via FMV, 30% minimum aux communes concédantes et 40% maximum aux partenaires hors canton. Plus les retours des concessions s’exerceront, plus le grand public saisira, par l’exemple, la valeur cumulée de ce patrimoine hydroélectrique, en particulier grâce à la rente de ressource. C’est la grande qualité de cette stratégie en faveur des générations futures.
David Melly, Président de l'Association des communes concédantes
«La stratégie valaisanne accorde une grande souplesse aux communes
Quelles sont les principales opportunités de ces retours des concessions pour les communes concédantes ?
Elles doivent impérativement faire le point sur leurs besoins en eau. Les multiples usages de cette ressource vitale sont connus et toutes les opportunités doivent être analysées, y compris celle liée à la production d’énergie. Les concessions de l’époque contenaient déjà des dispositions sur l’eau potable ou l’irrigation. Elles doivent désormais aussi intégrer les enjeux du tourisme ou de la protection contre les dangers naturels. A ce titre, FMV constitue un partenaire de confiance pour soutenir les communes dans les différentes étapes de ce processus stratégique.
Comment qualifiez-vous vos relations avec les communes non concédantes et l’Etat du Valais dans ces dossiers de droits d’eau ?
Nous avons de bonnes relations avec ces deux partenaires. Les communes non concédantes tissent aujourd’hui des contacts avec nous pour discuter de futures participations dans les aménagements hydroélectriques. L’ACC et le Canton, par son Service de l’énergie et de la force hydraulique, partagent une vision commune à réussir ensemble les retours des concessions, au bénéfice de la communauté valaisanne. L’ACC avait d’ailleurs soutenu la loi cantonale sur l’énergie en 2017. Nous souhaitons par ailleurs intensifier nos échanges avec toutes les collectivités publiques et rappeler que le canton et les communes concédantes défendent les mêmes intérêts.
A RETENIR
Dix ans avant le délai officiel, les collectivités peuvent demander un état des lieux des installations hydroélectriques à la société d’exploitation.
L’ACC et le Canton, par son Service de l’énergie et de la force hydraulique, partagent une vision commune à réussir ensemble les retours des concessions, au bénéfice de la communauté valaisanne.
L’ACC et FMV soutiennent les communes dans les différentes étapes d’un processus de retour de concession.

© Photos :
-Chris Blaser Photography
-Commune d’Anniviers

C’est donc une stratégie tout à fait applicable sur le terrain…
En effet. La stratégie valaisanne accorde une grande souplesse aux communes. En fonction de leur situation financière, elles peuvent conserver une partie de la propriété de l’aménagement et mettre en gestion cette énergie en leur qualité nouvelle de producteur, tout en vendant une autre partie à des partenaires extérieurs. Le système peut être qualifié de pragmatique parce qu’une marge de manœuvre existe. Je sens d’ailleurs une réelle volonté des communes concédantes de conserver au minimum 30% de la propriété des aménagements, en accord avec la stratégie valaisanne. L’ACC encourage fortement ses membres d’aller dans ce sens.
Les autorités communales ont un rôle à jouer décisif dans la réalisation de la stratégie Forces hydrauliques du Valais. Quel est leur état d’esprit face à ces responsabilités ?
Je suis optimiste quant à leur état d’esprit positif. Et persuadé qu’un membre d’un exécutif communal désireux d’empoigner ce dossier complexe peut trouver les ressources nécessaires pour développer de bonnes compétences et relever au mieux ces défis. Dans cette optique, l’ACC soutient les conseillers communaux en matière d’informations et d’organisation.
Les partenaires historiques, souvent relayés par les médias nationaux, estiment que le processus des retours des concessions entraverait la réalisation de projets de modernisation dans la force hydraulique en général et dans les seize projets d’extension en particulier, en raison du manque de clarté dans l’estimation de la valeur résiduelle des aménagements à la fin des concessions, ce qui freinerait les actuelles sociétés exploitantes à investir…
Cet argument est inexact. Certes, la loi prévoit qu’en cas de modernisation ou d’investissements, les propriétaires actuels soient indemnisés à l’échéance. Les bases légales fédérales et cantonales sont d’ailleurs connues. Plusieurs organismes comme la Conférence gouvernementale des cantons alpins ont mis en place des modes d’emploi pour les parties prenantes. Les exemples en matière de réhabilitation ou d’extension existent en Valais, comme Gougra, Cleuson-Dixence ou Mauvoisin. Aujourd’hui, les communes concédantes ont toutes les cartes en mains pour faire avancer les projets. Mais à une condition : que les partenaires historiques, actuels exploitants d’aménagements qui ont des obligations, partagent ouvertement toutes les informations indispensables à l’élaboration des calculs liés à l’indemnité équitable en fin de concession ou à la reconnaissance en plus-value lors de projets d’extension de la force hydraulique. C’est une question fondamentale de transparence dans une logique de confiance. Pour une vision partagée de la force hydraulique en Valais.